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Chronique & Article de fond

Des citoyens d’Hiroshima désirent la visite du pape qui soutient toujours l’abolition des armes nucléaires

Le pape François a récemment exprimé son intention de se rendre au Japon pour l'année prochaine. Les villes d’Hiroshima et de Nagasaki ainsi que les groupes de survivants de la bombe atomique souhaitent avec ardeur que le pape visite à cette occasion, les deux villes frappées par la bombe atomique. Comme le Vatican a déjà ratifié le traité d’interdiction des armes nucléaires, ils pensent que la visite du pape à Hiroshima et Nagasaki pourra jouer un rôle essentiel dans le contexte de l’abolition des armes nucléaires. En effet, ces deux villes ont déjà appelé les États dotés d'armes nucléaires à ratifier ce traité afin d’accélérer l’abolition des armes nucléaires. Pourtant, certains disent qu’un appel plus fort de la part des citoyens est nécessaire pour que la visite du pape puisse être réalisée.

M. Hirakata Matsushima, chef de la division de la promotion de la paix de la ville d’Hiroshima, a accueilli avec satisfaction le projet de la visite du pape au Japon et a déclaré que : « C'est une bonne nouvelle. J'espère que le pape va lancer un appel à la paix dans la ville dévastée par la bombe atomique ».

Demande de visite du pape lancée par Hiroshima et Nagasaki

La ville d'Hiroshima et la préfecture d'Hiroshima ont ensemble intensifié leurs efforts pour réaliser la visite du pape à Hiroshima, après la visite en janvier dernier de M. Paul Richard Gallagher, secrétaire chargé des relations avec les États du Vatican (qui correspond au poste de ministre des affaires étrangères). Car M. Gallagher avait suggéré, pendant son séjour, la possibilité de la visite du pape François à la ville d’Hiroshima. Le gouverneur de la préfecture d’Hiroshima, Hidehiko Yuzaki a donc visité le Vatican en mai, puis quelques mois après le maire d’Hiroshima, Kazumi Matsui en novembre 2017 afin de demander officiellement au pape la réalisation de la visite au Japon.

Leur désir pour la visite du pape à Hiroshima est étroitement lié à l’influence considérable de l’Église catholique dans le monde entier avec 1,23 milliards d’adhérents. Le regretté pape Jean-Paul II a lancé « un appel à la paix » ainsi que l’abolition des armes nucléaires lors de sa visite à Hiroshima en 1981. Entouré par 25,000 participants, il a lu sa déclaration en neuf langues, devant le cénotaphe des victimes de la bombe atomique, ce qui a provoqué une grande réaction dans le monde.

Pour la ville d’Hiroshima, la politique et la philosophie du pape François sont aussi importantes. Le souverain pontife est d’origine Argentin et l’Argentine est un pays signataire du Traité visant l’interdiction des armes nucléaires en Amérique latine. Lorsque la négociation sur le traité d’interdiction des armes nucléaires a commencé aux Nations Unies, le pape a immédiatement publié une déclaration pour soutenir ces démarches menées par les diplomates internationaux. Et dès que le traité d'interdiction des armes nucléaires a été adopté, le Vatican a signé ce traité le 20 septembre 2017, premier jour de l’ouverture pour la signer.

Le pape rejette également l'idée de la dissuasion nucléaire, invoquée par les puissances nucléaires et les pays sous parapluie nucléaire, comme raison de leur opposition au traité. En effet, le pape pense que les armes nucléaires entraînent des conséquences si inhumaines que la dissuasion nucléaire n’a aucun sens et affirme que protéger son pays par des menaces de représailles nucléaires crée « un faux sentiment de sécurité ».

M. Toshiyuki Mimaki (76 ans), président de l’Association des survivants de la bombe A (Nihon Hidankyo) habitant à Kitahiroshima-cho de la préfecture d'Hiroshima, a déclaré : « J’aimerais que depuis Hiroshima et Nagasaki frappés par la bombe atomique, le pape appelle les pays qui ne veulent pas adhérer au traité d'interdiction des armes nucléaires à le ratifier ». Le traité entrera en vigueur, lorsque 50 nations l'auront ratifié. Et actuellement 19 pays l’ont déjà ratifié.

Le maire de Nagasaki, Tomihisa Taue, qui travaille avec les dirigeants d'Hiroshima pour réaliser la visite du pape, estime que le pape est une personne clé afin de souligner la nécessité absolue que le traité d'interdiction des armes nucléaires entre en vigueur ».

Aucun changement dans la politique du gouvernement japonais

Parallèlement aux démarches menées par les villes de Hiroshima et de Nagasaki, le gouvernement japonais dirigé par le premier ministre Shinzo Abe, a également demandé au pape de se rendre au Japon afin de donner un nouvel élan au désarmement nucléaire.

Cependant, le gouvernement lui-même a clairement déclaré qu'il n'a l'intention ni de signer ni de ratifier le traité. En mars dernier, la Commission épiscopale pour la question sociale de la Conférence des évêques catholiques du Japon (CBCJ) a envoyé au gouvernement japonais une lettre contenant une citation du pape, afin de lui demander de signer et ratifier le traité. Pourtant, il n’y a aucun changement dans la politique du gouvernement japonais.

Pour cette raison, certains se méfient des véritables intentions du gouvernement concernant la visite du pape. Mme Haruko Moritaki (79 ans), co-présidente du groupe de citoyens de l'Alliance d'Hiroshima pour l'abolition de l'arme nucléaire (HANWA), a exprimé sa préoccupation en déclarant que : « le gouvernement japonais voudrait simplement profiter de la visite du pape pour donner l'impression au peuple japonais qu’il fait des efforts sérieux en faveur du désarmement nucléaire, alors qu’il dissimule sa politique consistant à refuser d'adhérer au traité ».

Elle a également souligné que : « ce qui est important est de mobiliser encore plus de citoyens pour que la visite du pape à Hiroshima puisse être réalisée. Si cela se réalise, le pape, qui soutien toujours le traité d’interdiction des armes nucléaires, va de nouveau lancer un appel afin de faire entrer en vigueur ce traité depuis Hiroshima, un lieu dévasté par la bombe atomique ».

Écrit par Kyosuke Mizukawa, initialement publié le 24 septembre 2018
Traduction : Kuniko Satonobu

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